Lorsqu’en pleine Seconde Guerre Mondiale, des unités SS sont choquées par vos méthodes, cela en dit long sur votre comportement. Ce fut pourtant le cas d’Oskar Dirlewanger, officier SS commandant de la 36ème division SS Waffen Grenadier surnommée « brigade Dirlewanger ». Mais alors, pourquoi cet homme était-il aussi détesté, y compris parmi les siens. Voici quelques éléments de réponse.
De héros de guerre à criminel
Né le 26 septembre 1895, Oskar Dirlewanger est engagé le 1er octobre 1913 dans l’armée wurtembergeoise, l’une des unités de l’armée impériale allemande. Comme beaucoup d’allemands, il va ensuite participer aux combats de la Première Guerre Mondiale et servira notamment de mitrailleur au sein du régiment « König Karl » sur le front Ouest. Blessé six fois* et décoré des croix de fer de seconde puis première classe, il finira la guerre sur le front russe avec le grade de lieutenant. Une fois le conflit terminé, lui et ses hommes sont censés être internés en Roumanie, mais Dirlewanger désobéit et ramène sa compagnie en Allemagne.
De retour dans son pays, il est décrit dans un rapport de police comme étant « mentalement instable, violent, drogué et alcoolique ». Il va néanmoins rejoindre un corps franc** et participera notamment à la répression de la Révolution allemande de 1918-19. Durant le dimanche de Pâques 1921, il commandera un train blindé et s’attaquera à des miliciens communistes dans la ville de Sangerhausen et sera blessé à la tête durant l’attaque.
En parallèle de ces activités militantes, il obtient en 1922 un doctorat en science politique puis rejoint l’année suivante le parti Nazi et la SA. Toutefois, en 1934 et alors qu’il a déjà été arrêté plusieurs fois pour possession illégale d’armes et détournement de fonds, Dirlewanger est condamné pour avoir eu des relations sexuelles avec une mineure de 14 ans. Emprisonné pendant deux ans, il perd également son titre de docteur à l’université. Il va néanmoins récidiver quelques temps plus tard et sera cette fois enfermé dans le camp de Welzheim. Finalement, c’est l’intervention d’un ancien camarade de guerre, Gottlob Berger, haut-gradé SS, qui lui permettra d’être libéré puis d’intégrer la réserve de la SS.
* Il sera déclaré invalide à 40% et son bras et poignet gauche sont paralysés
** Freikorps en allemand : milices paramilitaires qui sont, à cette période, proche des mouvements d’extrême-droite
La création de la brigade
En juillet 1936, éclate la guerre civile espagnole qui oppose les républicains aux nationalistes de Franco. Ces derniers sont notamment soutenus par l’Italie et l’Allemagne qui envoient du matériel et des volontaires. Alors qu’il a initialement intégré la Légion étrangère espagnole, Berger le fera transférer dans l’unité allemande engagée en Espagne : la Légion Condor. Son engagement dans ce conflit et l’intervention, une nouvelle fois, de Berger lui permettront de réintégrer le parti Nazi et de retrouver son titre de docteur à l’université de Francfort.
Ainsi, lorsque la Seconde Guerre Mondiale éclate, Dirlewanger est nommé Obersturmführer soit l’équivalent du grade de lieutenant. Il prend le commandement d’une petite unité « spéciale » composée à l’origine d’anciens braconniers. En effet, l’idée initiale était d’utiliser les compétences de pistage et de tir des braconniers afin de traquer les partisans. Au fur et à mesure de l’avancée de la guerre, l’unité va étendre son recrutement à d’autres populations : des criminels de droit commun, des soldats allemands condamnés, certains détenus des camps, quelques prisonniers politiques et même des prisonniers de l’Armée Rouge. Ces renforts permettront à l’unité de devenir un bataillon, puis un régiment, puis une brigade et enfin une division.
Le profil des membres de l’unité et de son chef explique en grande partie les multiples exactions causées par la brigade. Plusieurs commandants, de l’armée mais également de la SS, se plaindront des méthodes employées par l’unité, mais l’appui de Berger et l’indifférence d’Himmler protégeront Dirlewanger et ses hommes de toute sanction.
Des massacres en série
Dans un premier temps, l’unité est chargée de missions de sécurité en Pologne là où Dirlewanger commande un camp de travail à Stary Dzików. Il y sera accusé par le juge SS Konrad Morgen de meurtre et de corruption mais c’est finalement le juge qui sera rétrogradé et envoyé sur le front de l’Est. Parmi les autres accusations, on peut notamment citer les pillages du ghetto de Lublin, l’extorsion de rançons et surtout la torture puis le meurtre de prisonnières juives par injection, pour son plaisir personnel. C’est dans ce contexte horrible que la rumeur de fabrication de savon composé en partie des restes de cadavres apparaitra.
En 1942, la brigade est affectée en Biélorussie pour mener des opérations anti-partisans, et une fois de plus Dirlewanger sera fidèle à sa réputation. Viols, tortures et meurtres seront courants pour les hommes de l’unité qui n’hésitent pas à utiliser des civils comme boucliers humains. Ces méthodes brutales auraient entrainé la mort de près de 30 000 civils et vaudront à Dirlewanger la Croix allemande en or en décembre 1943.
Néanmoins, le cours de la guerre s’est renversé après Stalingrad et à l’été 1944, les soviétiques lancent l’opération Bagration qui aboutira à l’anéantissement du groupe d’armée Centre. La brigade qui n’est pas habituée aux combats contre d’autres unités militaires va alors subir de très lourdes pertes qui seront néanmoins compensées. L’unité va alors être affectée à une nouvelle mission de « maintien de l’ordre » lors de la répression de l’insurrection de Varsovie. Une fois de plus, la barbarie de la brigade fera des ravages, notamment dans les hôpitaux où civils et militaires sont massacrés sans distinction, parfois au lance-flamme alors que les infirmières sont violées puis tuées. Cette fois encore, Dirlewanger est récompensé par sa dernière promotion au rang d’Oberführer (grade à mi-chemin entre colonel et général de brigade dans l’armée française) et la remise de la Croix de chevalier de la Croix de fer.
Une fin à son image
Alors que sa brigade a réprimé le soulèvement slovaque en octobre 1944, l’unité est de nouveau opposée à l’Armée Rouge en février 1945, et sans surprise, la brigade est balayée et subit d’importantes pertes. Le 25 avril, il ne reste plus qu’une cinquantaine d’hommes sur les six mille membres de l’unité. Dirlewanger de son côté reçoit une balle dans la poitrine lors des combats puis décide de se cacher. Il est néanmoins arrêté le 1er juin 1945 par des soldats français et emprisonné au camp d’Altshausen. Les circonstances de sa mort sont alors obscures, les Français parlant d’une crise cardiaque. Néanmoins, la version la plus communément admise est qu’il fut reconnu par d’anciens détenus des camps de concentration puis battu à mort.
C’est tout pour ce portrait assez horrible d’un personnage qui l’était tout autant. Néanmoins si l’article vous a plu, n’hésitez pas à le partager sur les réseaux ! En attendant, je vous dis à bientôt 😉