L’image de la papauté est naturellement liée à Rome et plus particulièrement au Vatican, siège de l’Eglise catholique. Pourtant, durant le XIVème siècle, la ville d’Avignon va devenir la capitale de la chrétienté occidentale. Une situation qui me donne aujourd’hui l’occasion de vous parler du plus grand palais gothique d’Europe : le palais des papes d’Avignon.
Les rapports compliqués de la France avec la papauté
Situé le rocher des Doms, le palais des papes comprend deux ensembles : le palais Vieux et le palais Neuf. Le premier est une forteresse assez austère construite sous Benoît XII alors que le deuxième, orné de magnifiques fresques, fut édifiée sous Clément VI. Cependant, au-delà de la construction de ce palais, son histoire et celle de la ville d’Avignon sont marqués par un lourd contexte politico-religieux.
En effet, durant le début du XIVème siècle, les grandes familles romaines se livrent une lutte féroce pour le contrôle du siège pontifical et des avantages qui y sont rattachés (prestige, pouvoir et argent). D’un autre côté, les grands chefs d’Etat européens, à commencer par le roi de France, Philippe le Bel, entendent se libérer du contrôle des papes. Pour cela, Philippe n’hésitera pas à envoyer son homme de confiance, Guillaume de Nogaret, à Rome afin de s’emparer du pape Boniface VIII, qui s’apprêtait à excommunier le roi. Sauvé par un soulèvement populaire en sa faveur, le pape mourra cependant un mois plus tard à Rome, le 11 octobre 1303. Le successeur de Boniface, Benoît XI excommuniera Nogaret pour sa tentative d’enlèvement mais mourra dès 1305.
Philippe le Bel fera alors jouer son influence pour favoriser l’élection de Bertrand de Got, archevêque de Bordeaux, qui sera élu sous le nom de Clément V. Le nouveau pape, élu à Pérouse et sacré à Lyon, va alors s’installer dans le Comtat Venaissin, territoire appartenant à la papauté depuis 1274. Son successeur, Jean XXII va quant à lui s’installer à Avignon, un choix qui sera confirmé par son successeur Benoît XII. Il faudra cependant attendre 1348 pour que Clément VI rachète la ville d’Avignon à la reine Jeanne Ier d’Anjou, cette dernière ayant besoin de financer son retour à Naples.
Néanmoins, le retour des papes à Rome en 1376 ne mettra pas fin à la crise qui couve au sein de l’Eglise, le nouveau pape, Urbain VI, se brouillant avec une partie des cardinaux restés à Avignon. Ces-derniers, avec le soutien de Jeanne Ier d’Anjou et du roi de France, Charles V, désigneront alors un nouveau pape : Clément VII. Cet épisode historique sera alors connu sous le nom de grand schisme d’Occident. Ainsi, de 1378 à 1430, Avignon accueillera quatre antipapes* Clément VII, Benoît XIII, Clément VIII et Benoît XIV.
Une fois la crise réglée, Avignon sera dirigé par un représentant du pape, appelé légat, assisté à partir de 1542 par un vice-légat. Néanmoins, suite à plusieurs différents entre la monarchie française et la papauté, la ville sera occupée sous Louis XIV (1663 et 1668) puis Louis XV (entre 1768 et 1774).
* Papes non reconnu par l’Eglise catholique
De la Révolution à nos jours
Alors que Paris est secoué par les évènements de la Révolution, la population avignonnaise, majoritairement pro-française expulse le représentant du pape, le vice-légat Filippo Casoni le 12 juin 1790 et un an plus tard, les habitants votent le rattachement de la cité à la France. La ville va alors connaître les excès révolutionnaires, notamment lors des massacres de la tour de la Glacière, les 16 et 17 octobre 1791, sous l’impulsion de Mathieu Jouve Jourdan, chef révolutionnaire connu pour sa cruauté.
Néanmoins, alors que la destruction du palais a été envisagée, le bâtiment est pillé puis transformé en caserne et en prison. En 1860, Viollet-le-Duc propose de restaurer l’édifice, mais la guerre de 1870 mettra un terme au projet. En 1871, les archives départementales y sont transférées et sont d’ailleurs toujours présentes. En 1902, la ville récupère le palais, mais il faudra attendre 1906-1907 pour que l’armée quitte le bâtiment ce qui permettra à la ville et à l’Etat d’entreprendre la rénovation de l’édifice.
Alors que les travaux sont interrompus durant la seconde guerre mondiale, l’après-guerre va permettre à Avignon de devenir la capitale des arts du spectacle. En effet, en 1947, le comédien Jean Vilar créera le festival d’Avignon, plus grand évènement de théâtre au monde, dont les spectacles se jouent chaque année au mois de juillet. Cette manifestation permet au palais des papes de retrouver une fonction culturelle prestigieuse alors que l’édifice sera classé au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1995.
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